Après sa prise de fonction à la tête du gouvernement, Youssef Chahed s’était précipité vers le ministère de l’Intérieur pour demander aux Directeurs Généraux d’agir avec célérité contre la corruption en général et les gros corrompus en particulier. Mais rien n’a été fait, non seulement à cause de la corruption qui atteint les responsables policiers eux-même, mais surtout à cause du fait qu’à chaque fois qu’un fonctionnaire a tenté d’attirer l’attention sur ce problème, il a été écarté. Cette nouvelle loi régit ce problème, elle accorde une protection très sérieuse, et même rétroactive, aux dénonciateurs de corruption.
La Justice elle même est lourdement touchée par le phénomène
Le problème touche toutes les administrations, à tous les niveaux. Même la Justice est lourdement touchée. Devenus totalement indépendants grâce à la Constitution de 2014, les juges empêchent désormais toute lutte efficace de l’État contre la corruption. Plusieurs gros bonnets en sont devenus arrogants, narguant l’État même sur les médias, en l’appelant à les arrêter, « s’il en a la capacité ».
Cette situation, catastrophique, a poussé le gouvernement à présenter un projet de loi susceptible de l’aider à combattre le phénomène. Le projet a été examiné durant de longs mois par l’Assemblée, Abderraouf El May, député du Bloc Al Horra précise : « nous l’avons transformée à 80% pour parfaire la protection des dénonciateurs ».
Cette loi de 36 articles, examinée depuis mardi 21 février, a été votée par 145 députés présents à l’ARP sur un total de 217.
Le texte met en place les mécanismes de dénonciation de la corruption et de protection des dénonciateurs. La loi punit tout acte de représailles à leur encontre, notamment dans la fonction publique, et assure à ces derniers une efficace protection contre les mesures disciplinaires de leurs supérieurs. Le ministre de la fonction publique, Abid Briki, a salué une « législation forte qui facilite la lutte contre la corruption ».
Pour une fois, exécutif et législatif se lancent des fleurs. « Personne, au sein de l’Assemblée n’a pu se positionner en porte à faux, ajoute Abderraouf El May, d’où l’efficacité de cette nouvelle loi, je tiens à remercier le ministre Abid Briki pour sa collaboration ».
Un combat encore « plus difficile » que celui contre le terrorisme
Depuis sa prise de fonctions à la mi-2016, Youssef Chahed a dit vouloir ériger la lutte anticorruption au rang des priorités. Une stratégie nationale a été annoncée en décembre 2016. M. Chahed avait jugé que ce combat s’annonçait encore « plus difficile » que celui contre le terrorisme. La corruption a en effet été banalisée dans tous les domaines du quotidien. Chawki Tabib, président de l’Instance Nationale Contre la Corruption a estimé qu’elle avait atteint un stade dangereux pour l’État lui-même.
Cette nouvelle loi marque une grande étape au niveau de cette lutte.