WASHINGTON. Le Fonds monétaire international (FMI) s’apprête à verser une nouvelle tranche de 319 millions de dollars à la Tunisie après l’avis favorable d’une mission qui s’y est rendue ces derniers jours.
Lundi, le FMI a indiqué dans un communiqué que sa mission et les autorités tunisiennes s’étaient entendues sur les modalités de la poursuite du programme de réformes décidé en mai dernier et portant sur un prêt d’un total de 2,9 milliards de dollars. Sur ce total, quelque 638,5 millions de dollars auront été versés avec ce nouveau déboursement.
Les conclusions de la mission doivent à présent être approuvées par le conseil d’administration du FMI qui suit quasi systématiquement les recommandations de ses équipes.
Tunis avait confirmé en février que le versement de la deuxième tranche d’aide avait été reporté en raison du retard pris dans la mise en œuvre des réformes.
Le pourcentage de la masse salariale dans le PIB total est maintenant l’un de plus importants au monde
« La Tunisie fait face à des défis économiques importants. Les déficits budgétaires et des comptes extérieurs ont atteint des niveaux record, le pourcentage de la masse salariale dans le PIB total est maintenant l’un de plus importants au monde et la dette publique a encore augmenté à 63 % du PIB à la fin 2016 alors que l’inflation de base a augmenté. La croissance en 2017 devait doubler à 2,3 %, mais cela restera trop bas pour réduire sensiblement le chômage, surtout dans les régions de l’intérieur du pays et parmi les jeunes […] La situation économique difficile réclame des mesures rapides et fermes pour maintenir la stabilité économique et encourager la création d’emplois », soulignent les conclusions de la mission.
L’économie tunisienne subit la « dynamique diabolique » d’une réglementation caduque et d’une dérégulation sauvage
La relance de l’économie tunisienne reste tributaire d’une mauvaise volonté affichée du législateur, démultipliée par la corruption galopante de l’administration, le tout grevé par une crise de confiance générale.
Plusieurs lois nécessaires à la relance, dont celle de « l’état d’urgence économique », qui doit permettre au gouvernement de passer outre les blocages administratifs, restent dans les coulisses de l’Assemblée.
Au delà de cette donne négative, la Tunisie traîne la lourde casserole de la dictature et de son corollaire, la corruption, qui ont détruit, ces trois dernières décennies, les outils de régulation de l’économie qu’avait mis en place l’État. Ces outils, Banques de développement, sociétés d’économie mixte, compagnies nationales, etc… ont été vidés de leur substance par la privatisation des secteurs à haute valeur ajoutée au détriment des autres secteurs, doublement alourdis.
La question économique en Tunisie se pose avec une acuité nouvelle : l’État dispose toujours d’un service public pléthorique mais il a perdu toute possibilité de réguler l’économie.
C’est toute la politique économique du pays qui est à repenser.
Une poussée libérale supplémentaire n’aboutira qu’à augmenter une crise économique et sociale aigüe née, justement, de la perte inconsidérée par l’État, de ses outils de régulation de l’économie.
Or cette vision économique est aujourd’hui cruellement absente des dossiers de l’État, malgré l’existence de plusieurs travaux édifiants des nombreux économistes tunisiens ignorés au profit des sombres apprentis sorciers du « y a qu’à ».