Les Tunisiens ne croient pas à l’effondrement du pays, ils disent: « on entend parler de cela depuis des années ». C’est vrai qu’on en parle depuis longtemps, mais ce qu’ils ignorent c’est que lorsque tous les vecteurs sont touchés, l’effondrement peut venir d’un rien, or les voyants ne sont pas au rouge, mais au noir.
La situation n’est pas nouvelle, elle était déjà catastrophique lorsque Béji Caïd Essebsi avait décidé, l’été 2016, de remplacer le chef du gouvernement Habib Essid par Youssef Chahed.
Youssef Chahed avait pour mission d’engager des réformes déjà prêtes, comme celle de « lutte contre la corruption des fonctionnaires » ou encore celle de « l’Urgence économique » ou encore celle des « Caisses nationales » etc, etc…
Ces réformes pouvaient, si elles avaient été immédiatement défendues et lancées, relever le pays, surtout que le méga projet d’investissement « Tunisia 2020 » était alors fin prêt. Mais aucune communication politique n’a été lancée pour les défendre et elles sont donc restées dans les couloir de l’assemblée jusqu’à il y a quelques semaines, lorsqu’il a été question de remplacer Youssef Chahed. Là, comme par miracle, il est monté au créneau, commençant enfin à engager les réformes pour lesquelles il a été nommé il y a presque deux ans.
Trop peu, trop tard
La situation est désormais irrattrapable, non pas dans l’absolu comme veut le faire croire le gouvernement, mais irrattrapables par Youssef Chahed, car non seulement la stabilité politique qui a prévalu lors de sa nomination a éclaté, mais, au lieu de gérer l’État, Chahed s’est mué en prétendant aux élections de 2019, ce qui a rendu ses rapports avec ses soutiens politiques exécrables et rend toute réforme désormais impossible.
Une ambiance politique excécrable
Youssef Chahed a développé de très mauvais rapports, non seulement avec plusieurs de ses propres ministres, mais également avec son parti, l’UGTT et l’UTICA, pour ne nommer que les principaux acteurs socio-politiques.
En fait, il n’est désormais soutenu que par Ennahdha, cette même Ennahdha qui, par la voix de son chef, a voulu, l’année dernière, lui interdire d’aspirer à la présidence de la République. Que s’est-il passé depuis? En réalité, Youssef Chahed avait, début 2017, entamé une guerre contre la corruption et avait beaucoup gagné en popularité, ce qui avait fait réagir Ennahdha qui voyait d’un très mauvais œil l’émergence, chez les progressistes, du leader qui fait tant défaut.
Avec l’arrestation de Chafik Jarraya, Youssef Chahed s’était, effectivement, rapproché de cette stature, sauf que cette guerre contre la corruption s’est révélée être une guéguerre personnelle suivie d’erreurs monumentales, comme celle qui a conduit à l’arrestation de deux éléments parmi les plus sérieux et les plus importants de la Sureté Nationale tunisienne sur la base de fausses accusations et par la fabrication de fausses preuves, le tout protégé par le secret de l’instruction de la justice militaire.
Parallèlement, c’est à une gestion catastrophique du pays que nous assistons, ce qui a entraîné Ennahdha à changer de position et à soutenir Youssef Chahed puisqu’il est devenu son meilleur agent pour continuer à affaiblir l’État et à miner les forces progressistes.
Bas calculs politiciens alors que le pays court vers la catastrophe
Mais ces bas calculs politiciens nous éloignent d’une très dangereuse réalité que peu de Tunisiens réalisent et qui risque de surgir très soudainement dans les mois qui suivent: celle de l’inflation à deux chiffres, des défauts de paiement généralisés et de l’effondrement de plusieurs secteurs fondamentaux déjà en crise profonde, comme la Santé, l’Education, le Transport, etc… ce qui créera l’effet boule de neige tant redouté par les économistes et qui se répercutera sur les autres domaines qui fonctionnent encore.
La Sureté Nationale en passe d’être détruite par Youssef Chahed
Youssef Chahed a également trouvé le moyen de se mettre sérieusement à dos le ministre de l’Intérieur, un homme connu pour son sérieux et son abnégation et son esprit républicain et qui a joué un rôle essentiel dans la lutte contre le terrorisme lorsqu’il dirigeait la Garde Nationale. Résultat: alors que la Tunisie s’apprête à recevoir des millions de touristes, les cadres de la sureté nationale ne peuvent plus travailler.
Inquiets par cette situation, les chancelleries ont déjà averti leurs professionnels du tourisme.
Mais la question n’est plus là, le problème est que si la Tunisie subit une nouvelle attaque terroriste majeure, elle perdra définitivement la confiance de plusieurs pays qui l’ont déjà soutenue envers et contre toute logique.
Cette éventuelle attaque terroriste est loin d’être hypothétique car tous les efforts faits pour contrer ce fléau ont été annihilé par Youssef Chahed en personne qui a fait arrêter de façon tout à fait arbitraire et particulièrement inepte deux des principaux artisans de la victoire contre les terroristes.
La dernière carte est aux mains de Béji Caïd Essebsi
En voulant séduire par la nomination d’un « quadra », Béji Caïd Essebsi ne pensait pas précipiter la ruine du pays. Désormais, il sait la vérité, mais il se trouve bloqué par des considérations politiques. Or, quelles considérations politiques passent avant l’intégrité de l’État?
Il appartient au Président de la République de dire la vérité sur ce qui se passe et de défendre l’État contre des pratiques que tous les Tunisiens voulaient éradiquer, il lui appartient de nommer un nouveau chef de gouvernement qui ne s’occupera que de la situation économique sur la base d’un plan précis et soutenu par les réformes idoines. Un nouveau gouvernement qui se tiendra loin des considérations politiciennes, aura les coudées franches et nous permettra de sauver ces vingt mois qui restent avant les échéances de 2019 et qui risquent de faire sombrer la Tunisie en plein cirque électoral.
Que les passionnés de politiques continuent à préparer leur campagne comme bon leur semble, mais pas sur le dos de la Tunisie.