Walid Phares, conseiller de campagne de Trump pour la région MENA a déclaré hier soir – jeudi 13 avril 2017 – que les islamistes tunisiens (Ennahdha) veulent faire tomber le gouvernement.
Voici la traduction du post de M. Phares : « Nous avons été informés de tentatives faites par les islamistes tunisiens en coordination avec les factions islamistes libyennes à Tripoli (Fajr Libya) avec pour objectif de renverser le gouvernement légitime tunisien . Si les rapports sont confirmés, ce serait un défi majeur pour les modérés en Tunisie et dans l’ensemble de l’Afrique du Nord, et donc pour les États-Unis ».
Info, intox, avertissement, ballon d’essai ? La déclaration est très grave et elle sous entend un changement de la politique étrangère américaine envers Ennahdha – évolution qui couve depuis longtemps chez les Républicains US – et par ricochet, envers son allié islamiste libyen.
Pourquoi Ennahdha risquerait-elle de se mettre à dos non seulement le Gouvernement tunisien, mais aussi celui des USA ? Ces derniers auraient-ils définitivement décidé de considérer les Frères musulmans comme organisation non grata ?
Ou s’agit-il d’une réaction des islamistes face à une évolution sur le terrain libyen ? Difficile de conclure car très peu d’informations fiables existent sur ce qui se passe en Libye où trois gouvernements coexistent difficilement avec Khalifa Haftar à l’est, Fajr Libya à l’ouest, le tout très peu chapeauté par un « gouvernement d’union nationale » créé sous les auspices de l’ONU, dirigé par Fayez al-Sarraj. Alors que Fajr Libya est soutenu par « l’Internationale islamiste », le maréchal Haftar, lui, est soutenu par l’Egypte et la Russie.
Beaucoup d’informations très peu fiables circulent, lâchées par les membres de l’Otan (GB, USA) sur une éventuelle partition de la Libye, c’est ainsi que quelques semaines avant l’investiture de Donald Trump, Sebastian Gorka, haut conseiller de Donald Trump chargé de la politique étrangère, avait proposé une partition de la Libye en trois États différents. Plus proche de nous, il y a 3 jours, le quotidien britannique The Guardian a publié un article sur une éventuelle division de la Libye en trois parties, expliquant que la situation se muait en une nouvelle étape de la guerre civile, et que le gouvernement était incapable de mettre de l’ordre en Libye.
Reste que le problème essentiel est celui du gouvernement islamiste de l’ouest de la Libye, pratiquement le dernier gouvernement islamiste opérationnel en Afrique du Nord, d’où l’extrême urgence pour l’internationale islamiste de le sauvegarder, surtout que Khalifa Haftar, après s’être assuré du soutien de l’Egypte et de la Russie, lorgne désormais sur un soutien de l’Algérie qui, jusqu’à nouvel ordre, préfère rester neutre. Or, la situation en Algérie peut évoluer d’un moment à l’autre…
Mais plus urgent encore qu’une éventuelle évolution du camp algérien, le comportement du Gouvernement Trump qui souffle le chaud et le froid concernant les islamistes. La question libyenne a-t-elle été discutée entre Sergueï Lavrov et le secrétaire d’Etat américain Rex Tillerson lors de leur rencontre de mardi ? Rien n’a filtré là-dessus. Mais il est probable qu’il y ait eu un échange de vues qui peut constituer le prélude d’un accord russo-américain.
Le post de M. Phares devient alors parfaitement plausible car une telle entente sous entend une rupture dans la politique étrangère américaine qui entraînerait Ennahdha à défendre son allié. Or, le Gouvernement tunisien est complètement aligné sur les USA et Ennahdha n’a pas intérêt à se mettre à dos le Gouvernement américain. Le post de M. Phares constitue peut-être un avertissement en ce sens.