Sur la revue ALL ABOUT HISTORY de ce mois de juillet 2017, le professeur Yozan Mosig donne son avis sur les doutes entourant la bataille de Zama
(Texte original en bas de l’article)
M. Yozan Mosig est Professeur à l’Université du Nebraska Kearney. Il était auparavant au Georgia Southwestern College et à l’University of Florida. Il publie régulièrement dans The History Herald.
QU’IGNORE-T-ON À PROPOS DE ZAMA ?
Nul n’a été capable de localiser la bataille avec exactitude. Le village de Jama, près de Siliana, et bien d’autres lieux, ont été considérés comme ceux de la bataille de Zama, mais sans aucune preuve archéologique. Alors que la plupart des grandes batailles de la seconde guerre punique sont clairement localisées, le site de Zama, lui, demeure introuvable. C’est particulièrement gênant compte tenu de l’habitude des Romains à ériger des monuments in situ pour commémorer leurs victoires : or il n’y a même pas de colonne solitaire, de statue ou de ruine qui marque la place.
EXISTE-T-IL DES DISTORSIONS SUR LA BATAILLE DE ZAMA DANS LE DOSSIER HISTORIQUE QUI NÉCESSITENT UNE CORRECTION ?
Les récits classiques de la Bataille de Zama sont étrangement inconsistants et contradictoires. Le déroulement de la lutte manque d’imagination au point qu’on se demande s’il est vraiment le résultat d’un esprit militaire de premier ordre tel qu’Hannibal, ou même Scipion. Il se lit comme l’invention d’un écrivain dépourvu de la vision d’un grand militaire. L’histoire des 80 éléphants n’est pas crédible compte tenu de l’absence de ces derniers dans les précédentes batailles d’Utique et des Grandes Plaines.
La récente datation du célèbre port punique militaire de Carthage au IIe plutôt qu’au IIIe siècle avant notre ère, a créé un paradoxe entraînant d’autres doutes. Selon H.R. Hurst, dans ses Excavations at Carthage, le port a été construit entre 201 et 146 avant notre ère, donc, après la fin de la guerre. Comme l’affirme Abdelaziz Belkhodja dans son livre, Hannibal Barca, l’histoire véritable et le mensonge de Zama (2014), cela pose de sérieux doutes sur l’authenticité du traité de paix que Carthage devait signer après la prétendue défaite de Zama. Le traité, qui remonte à 201 avant notre ère, a limité la marine carthaginoise à dix navires de guerre, mais le port pouvait en contenir 220, ce qui signifie que cette disposition – au moins – du traité est fictive. Si la guerre s’est terminée par un accord de paix donnant des concessions à Rome et sans la dissolution de la marine punique, comme l’a proposé Hannibal lors de sa réunion avec Scipion, alors aucune bataille finale n’était nécessaire. La construction du port militaire après la guerre serait alors logique, tout comme le manque de monument pour marquer l’emplacement de la bataille fictive. Il est donc possible que la bataille de Zama soit une propagande des Romains pour soigner leur fierté blessée par 16 ans d’invincibilité d’Hannibal en Italie, et surtout par leur immense défaite à Cannae, ce qui les a obligés à créer l’illusion d’avoir obtenu une victoire comparable.
ZAMA: THE BATTLE THAT NEVER WAS?
Professor Yozan Mosig explains why there’s so much doubt surrounding the event
WHAT DON’T WE KNOW ABOUT ZAMA?
No one has been able to find the exact location of the battle. The village of Jama, close to Siliana, some 150 kilometres southwest of Tunis, and a number of other candidates have been suggested but without archaeological verification. The site remains unknown, while those of practically all other major battles waged during the Second Punic War are reasonably well established. This is particularly troublesome in view of the Romans’ penchant for erecting monuments in situ to commemorate their greatest victories – there is not even a lonely column, statue or ruin marking the place.
ARE THERE DISTORTIONS ABOUT THE BATTLE OF ZAMA IN THE HISTORICAL RECORD that need correcting?
The classical accounts of the Battle of Zama are strangely inconsistent and contradictory. The course of the struggle is unimaginative to the point of being suspect as the alleged outcome of a first-rate military mind such as Hannibal’s and even Scipio’s. It reads more like the invention of a writer lacking the vision of a great general. The 80 elephants are not credible, in view of their lack at the preceding battles of Utica and the Graet Plains.
The recent dating of the famed military Punic Port of Carthage to the 2nd rather than the 3rd century BCE has created a paradox leading to further doubts. According to HR Hurst, in his Excavations at Carthage, the port was built at some point between 201 and 146 BCE, after the end of the war. As Abdelaziz Belkhodja argues in his book, Hannibal Barca, l’histoire véritable et le mensonge de Zama (2014), this casts serious doubts on the authenticity of the peace treaty that Carthage was required to sign after the alleged defeat at Zama. The treaty, wich dates back to 201 BCE, limited the Carthaginian navy to no more than ten warships, but the port had berths for 220, wich means that at least that provision of the treaty is fictifious. If the war ended with a peace agreement giving concessions to Rome and without the dissolution of the Punic navy, as proposed by Hannibal in his meeting with Scipio, no final battle was needed. The construction of the military port after the war would then make sense, as would the lack of monument to mark the location of the fictitious battle. It is therefore possible that the battle of Zama was a fabrication of Roman propaganda to heal their wounded pride from Hannibal’s undefeated years in Italy, and especially their defeat at Cannae, wich necessitated creating the illusion of having achieved a comparable victory.